Dominique
10-05-2020
Demain, on déconfine. Déjà ? C’est que moi j’y avais pris goût à faire ma page d’écriture tous les jours. Fallait bien passer le temps n’est-ce-pas ? Puis, c’était une façon de rester en contact avec les autres, de briser l’isolement forcé et consenti, de communiquer ensemble, de se soutenir mutuellement. Avec vous qui avez lu occasionnellement ou régulièrement ces pages, vous dont j’ignore souvent qui et combien vous êtes. Vous que j’ai peut-être amusés ou distraits quelquefois, agacés parfois ou simplement laissés indifférents.
Aujourd’hui, c’est le cinquante-huitième jour et le moment est venu de fermer ce journal de confinement. Je tiens à préciser que j’ai toujours vérifié les informations que j’y ai rapportées. Pas de fake news dans ces pages. Quant à mes opinions, elles ne relèvent que de mes convictions, de mes humeurs, de ma fantaisie. Libre à chacun de les approuver ou de les critiquer.
En clôturant ce journal j’ai bien sûr une pensée pour tous ceux et celles qui ont le plus souffert de cette épidémie qui les a contaminés ou endeuillés et pour tous ceux et celles qui ont soigné, protégé, secouru. Pour tous ces gens qui « ne sont rien » et sans lesquels la vie quotidienne aurait été impossible.
Avant de mettre un point final à ces pages, du moins je l’espère, je tiens à dire quelques remerciements personnels : à Claire qui m’a mis le pied à l’encrier ; à Aldo et Francis, mes comparses, qu’une amicale émulation a animés pendant toutes ces semaines ; à Zumeru qui, jour après jour, a accompagné et illustré mes textes, souvent de manière impromptue, par des collages poétiques, magiques et remplis d’humour. À ceux et celles qui, par leurs likes, m’ont encouragé à poursuivre ou qui, par leurs partages ont apporté un éclairage supplémentaire à mes propos.
Je continuerai cette aventure de l’écriture avec une chronique hebdomadaire du déconfinement toujours sous le titre de « Mieux vaut en rire » puisque, dans le monde d’Après il ne s’agirait pas de perdre la main
Pour conclure, avec la hauteur de vue que je lui envie, je reprendrai les propos (Le Monde du 19 avril 2020) d’Edgar Morin :
« L’expérience des irruptions de l’imprévu dans l’histoire n’a guère pénétré les consciences. Or, l’arrivée de l’imprévisible était prévisible mais pas sa nature. D’où ma maxime : « Attends-toi à l’inattendu ».
Aldo
07-05-2020
L’amour ne serait plus enfant de Bohème !
Mais une créature de la toile
Ou on sème plus que l’on aime.
On propose on affiche on déballe,
On s’offre à la planète
Du fond de sa retraite.
Enfumeur,
Bonimenteur !
L’amour ne serait plus enfant de Bohème !
Parfois des chemins virtuels
Y mèneraient semble-t-il quand même !
C’est à désespérer du charnel !
Aldo
05-05-2020
Étrange ! Ce n’est ni un cauchemar ni un rêve,
Ce n’est pas non plus le sentiment d’une trêve
Ni encore une parenthèse, un temps suspendu.
C’est un moment trompeur douloureux mal vécu.
Le cours du présent s’est chargé d’inquiétudes.
C’est pour chacun un lourd quotidien, inédit.
L’irruption brutale de nouvelles habitudes
Domestiques ou sociales, d’autres règles de vie.
Sera-t-il seulement possible après ces jours
De tenir une main amicalement tendue,
De réinventer le désir l’espoir l’amour,
De retrouver enfin des rivages bien connus !
Dominique
01-05-2020
Aujourd’hui, Premier mai, j’ai trempé ma plume dans l’encre rouge.
Ah ! Monsieur vous osez déclarer que grâce à vous, nous l’avons échappé belle, que le bilan, provisoire, aurait pu être bien pire.
Ah ! Monsieur vous arborez une mine compassée prônant l’humilité. Un vulgaire virus vous aurait rabaissé le caquet ?
Ah ! Monsieur vous jurez vos grands dieux que vous avez compris la leçon et que plus rien après ne sera comme avant.
Il faut que tout change pour que rien ne change, tous les maitres en place, avant vous, en ont fait le pari et l’ont perdu.
Ensuite, vous irez rejoindre les vôtres et en petit comité, dans le salon doré de votre château, à l’abri des oreilles indiscrètes, vous ferez vos comptes et vous évaluerez, en vous octroyant une substantielle marge d’erreur, ce qui est bon pour le peuple, et vous ferez la part du feu en lui laissant quelques miettes et quelques os à ronger.
Des masques, des gants, des tests. Tous ces trucs inutiles hier, obligatoires après-demain.
Quant au reste, des crédits pour les hôpitaux, les écoles, les gens d’en bas, on verra bien plus tard.
Ah ! Monsieur, décillez-vous les yeux,
Ouvrez vos oreilles.
Votre monde se dérobe sous vos pieds.
Vous et les vôtres n’abusez plus personne en vous résignant à renoncer provisoirement à vos dividendes, vous avez la trouille de perdre votre capital c’est tout.
Comme Harpagon avec sa cassette, vous allez partout implorant, pleurnichant, criaillant mes avions, mes automobiles, mon pétrole.
Ravalez vos hommages hypocrites aux personnels soignants, aux fonctionnaires, aux travailleurs exposés tous les jours à l’épidémie.
Vous êtes restés sourds à la colère des gilets jaunes.
Vous avez envoyé vos grenades sur les infirmières qui criaient misère.
Vous vouliez reculer l’âge de la retraite sous prétexte que l’espérance de vie augmentait !
Ah ! Monsieur, on ne pouvait tout prévoir, n’est-ce-pas ?
Récoltez maintenant ce que vous avez semé.
Un péril imprévisible, invisible, redoutable vous guette.
La clameur d’un peuple qui gronde, monte, déferle.
Ah ! Monsieur, on vous a assez vu, vous et vos pareils, réfugiez-vous dans vos paradis fiscaux, externalisez- vous, vous-mêmes et allez au diable. Dégagez !
Et laissez-moi chanter, avec Jean Ferrat
Ah ! Qu'il vienne au moins le temps des cerises
Avant de claquer sur mon tambourin
Avant que j’aie dû boucler mes valises
Et qu'on m'ait poussé dans le dernier train
Aldo
30-04-2020
XXXII
Tu es l’accolade d’un enfant
Tu es la fantaisie du vent
Tu es la rue sans barrière
Tu es une voile en haute mer
Tu es un sourire démasqué
Tu es une caresse dénudée
Tu es le galop d’un cheval
Tu es la ballade retrouvée
Tu es un air de carnaval
Tu es la place ensoleillée
Tu es la belle endormie
Tu es le regard ébloui
Tu es la vie qui renaît,
Tu es l’envie du jour d’après !